Le PDG de Binance démissionne


Un nouveau vent de panique souffle sur le monde des cryptomonnaies. Changpeng Zhao, PDG et fondateur du géant Binance, a été obligé de démissionner. Accusé de négligence en matière de lutte contre le blanchiment d’argent par la justice américaine, l’entrepreneur a cédé sa place.

Les régulateurs américains ont déclaré la guerre aux géants de la cryptomonnaie implantés aux États-Unis. Ces derniers mois, les autorités ont en effet multiplié les offensives, en déposant diverses plaintes, en réaction à l’effondrement de FTX. Échaudées par la disparition éclair de l’empire de Sam Bankman-Fried, les instances de régulation ont en effet décidé de serrer la vis. Des titans comme Coinbase ou Kraken ont été obligés de revoir leurs offres pour se plier aux exigences des autorités.

Dans ce contexte, Binance, la plateforme d’échange numéro un de l’industrie, s’est évidemment retrouvé dans le viseur des régulateurs. En février dernier, la plateforme a été obligée de faire une croix sur le BUSD, son stablecoin, suite à une offensive orchestrée par la Securities and Exchange Commission (SEC) des États-Unis. Un peu plus tard, l’exchange s’est attiré les foudres de la la Commodity Futures and Trading Commission (CFTC), l’agence fédérale chargée de la régulation des bourses de commerce américaine. L’organisme accuse Binance d’avoir enfreint à de multiples reprises le Commodity Exchange Act (CEA), la loi qui encadre le trading de matières premières.

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Aux origines de la démission de Changpeng Zhao

En parallèle, une enquête initiée en 2018 a fini par arriver à sa conclusion. Diligentée par le Département de la Justice des États-Unis, l’investigation visait à démontrer que l’infrastructure de Binance avait permis à des criminels de transférer des fonds illégalement. Dans le courant de l’été, le Département de la Justice a finalement réuni assez de preuves pour inculper Changpeng Zhao, le PDG et fondateur de Binance. L’entrepreneur sino-canadien, figure phare du monde des cryptomonnaies, est accusé d’avoir manqué aux exigences en matière de lutte contre le blanchiment d’argent des autorités.

Concrètement, Binance, sous l’égide de Zhao, n’a pas mis en place les restrictions nécessaires pour empêcher le blanchiment d’argent via sa plateforme. Cette négligence a permis à des entités visées par des sanctions économiques de la part des États-Unis de transférer des fonds illicitement. C’est le cas de plusieurs groupes terroristes. En effet, Binance n’a pas signalé les transactions suspectes effectuées par des organisations criminelles comme les Brigades Al-Qassam du Hamas, l’État islamique ou encore Al-Qaïda. Il s’agit d’une violation de l’International Emergency Economic Powers Act (IEEPA). Cette loi fédérale permet au président des États-Unis de réguler le commerce international  en cas de menace. La Maison Blanche s’est surtout appuyée sur la législation pour imposer des sanctions économiques contre des pays ou des organisations en réponse à des activités terroristes, des violations des droits de l’homme ou des agressions militaires.

Dans un premier temps, la justice américaine a préféré prendre du recul afin d’éviter une éventuelle débâcle de l’exchange. Le Département craignait en effet que l’annonce de poursuites judiciaires risque de précipiter la mort de la plateforme. Les autorités avaient peur que les investisseurs ne retirent brusquement tout leur argent des caisses de Binance. Ce scénario catastrophe, qui rappelle les derniers jours de FTX, aurait évidemment laissé les utilisateurs, ce qui n’est pas le but de la justice américaine. C’est pourquoi le Département a proposé un accord à la direction de Binance. Un terrain d’entente a été trouvé il y a seulement quelques jours.

Le fondateur de Binance reconnaît ses torts

Dos au mur, Changpeng Zhao a préféré démissionner. Le visage de Binance admet avoir commis des erreurs, et s’engage à en « assumer la responsabilité ». Pour le crypto-milliardaire, qui se présentait volontiers comme l’anti Sam Bankman-Fried, cet abandon vise à protéger Binance :

« Binance n’est plus un bébé. Il est temps pour moi de le laisser marcher et courir. Je sais que Binance continuera de croître et d’exceller ». 

Il prévoit d’ailleurs de plaider coupable à plusieurs des chefs d’accusation retenus contre lui. Les procureurs en charge de l’affaire réclament jusqu’à 18 mois de prison, bien que la peine maximale prévue par la législation atteigne les dix ans. Pour rester en liberté en attendant son procès, le magnat va devoir verser une caution de 175 millions de dollars.

C’est Richard Teng, un cadre dirigeant de Binance, qui prendra la tête de l’entreprise à la suite de Changpeng Zhao. Celui-ci jouit de « plus de trois décennies d’expérience dans les services financiers et la réglementation », vante l’ancien dirigeant. Teng a été engagé par Zhao deux ans plus tôt. De son côté, le milliardaire n’est plus autorisé à occuper un poste à la direction de Binance durant trois ans, bien qu’il puisse toujours œuvrer en tant que conseiller. Zhao précise d’ailleurs qu’il reste à « la disposition de l’équipe » de Binance.

Il conserve aussi sa participation majoritaire dans son entreprise. Dans le cadre de l’accord, Binance va également devoir payer une amende d’environ 4,3 milliards de dollars pour mettre un terme aux poursuites. À titre personnel, Zhao a quant à lui accepté de s’acquitter d’une amende de 50 millions de dollars.

« Binance est devenu le plus grand exchange de cryptomonnaie au monde, en partie à cause des crimes commis — maintenant, il paie l’une des plus grandes pénalités d’entreprise de l’histoire des États-Unis », fait valoir le procureur général des États-Unis, Merrick Garland, dans un communiqué, qui précise que Binance a fait semblant de se conformer à la loi fédérale.

Binance se retrouve sous tutelle

Au terme de l’accord, Binance a obtenu le droit de continuer ses activités. Néanmoins, l’exchange a accepté de donner accès à l’intégralité de ses documents internes. Surtout, l’entreprise est placée sous surveillance et tutelle pendant une période de cinq ans. Durant cette période, les autorités américaines vont avoir leur mot à dire sur la manière dont Binance gère ses activités. Pour la secrétaire au Trésor américaine Janet Yellen, la défection de Zhao, et la semi-prise de contrôle de Binance par la justice, « marquent une étape importante pour l’industrie ».

Comme le souligne Binance dans un communiqué, il ne faut pas mettre l’exchange dans le même sac que FTX. Bien que la plateforme admette avoir commis des erreurs, il n’y a actuellement rien qui indique que les fonds des clients aient été détournés ou utilisés à des fins frauduleuses. Jusqu’à preuve du contraire, les devises stockées sur l’exchange sont en sécurité. De même, Binance précise n’avoir jamais cherché à manipuler le cours des cryptomonnaies, contrairement à son ancien rival FTX.

Le marché crypto réagit à l’abandon du PDG

Les turbulences provoquées par cette annonce choc ont entamé le rebond des cryptomonnaies. En marge de la démission de Zhao, le cours du Bitcoin est repassé sous le seuil des 36 000 dollars. Suite à plusieurs semaines de hausse continue, la reine des cryptomonnaies était parvenue à venir frôler la zone des 38 000 dollars. Comme on s’y attendait, l’inculpation du patron de Binance a échaudé les investisseurs, bien que l’impact sur le marché reste finalement assez limité.

Cours Bitcoin Pdg Binance Démission
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Évidemment, l’annonce a surtout pénalisé le token de Binance, le BNB. La quatrième cryptomonnaie la plus valorisée du marché est passée de 270 à moins de 240 dollars en l’espace de quelques heures. La plupart des monnaies numériques a enregistré des pertes dans la journée d’hier. La valorisation boursière de l’industrie s’est ainsi contractée sous les 1400 milliards de dollars.

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